vendredi 6 juillet 2012

Dans son récent posting, Ahmed Jiddou Ould Aly fait erreur par oubli quand dit ceci:


jeudi 5 juillet 2012




" Enfin, je me permets de rappeler à l’auteur de l’article que l’exécution
des principaux auteurs de la tentative de putsch de 1987 n’est pas « la
seule fois où des Mauritaniens sont tués pour une tentative de coup
d’Etat, sans doute parce qu’ils étaient noirs ».  En 1981, les principaux
auteurs de la tentative de prise de pouvoir des Colonels Ahmed Salem et
Kader le 16 Mars, s’est terminée par leur exécution en compagnie de
Niang. Et seul Niang était noir ! "



En réalité Monsieur Ould Jiddou, voici les faits et ils confirment le propos de Bâ Mamadou Kalidou:

1.  La tentative de coup d'État des Officier Négro-Africains n'a jamais connu un début d'exécutioon

2.  En revanche, les opérations du Pustsh manqué du 16 mars a bel et bien été exécuté par le groupe de Kader et Ahmed Salem ould Sidi. Notre ami Soumaré Abdoul Aziz president de L'ODH (http://http://www.odh-mauritanie.com) a failli y laisser sa vie en poursuivant Kader dans les escaliers au CQG de l'État Major National. Une balle dans la jambe la jambe de Soumaré Abdoul Aziz a interrompu la poursuite contre Kader.  Pour la petite histoire, Kader avait fini par prendre le chef d'Etat Major en Otage.  La poule mouillée a failli faire réussir le Putsh en coopérant avec son agresseur pour sauver sa vie.  La poule mouillée s'appelait Maaouya ould Sid Ahmed Taya futur président de Mauritanie et futur auteur de nettoyage ethnique et de crimes contre l'humanité.

Bref, s'il faut s'en tenir aux faits, retenons plutôt le constat de Bâ Mamadou Kalidou: Sarr Amadou, Sy Saïdou et Bâ Seydi ont été exécutés le 6 décembre 1987 sur la base d'un projet de putsh... Sans doute parce qu'ils étaient noirs?


J'invite les lecteurs à lire un témoignage/hommage de Boye Alassane qui a échapé de peu à l'exécution des officiers négro-africains le 6 Décembre 1987.  Un autre texte riche et profond dans la lignée de celui de Bâ Mamadou Kalidou.


HOMMAGE À NOS TROIS PREMIERS MARTYRS
Par Boye Alassane Harouna

Le 22 octobre 1987, pour avoir tenté de renverser le Pouvoir raciste du Colonel Taya, voulu mettre fin au racisme d'État et instaurer une égalité communautaire dans le pays, plusieurs dizaines d'officiers et sous-officiers négro-africains sont arrêtés à Nouakchott, Nouadhibou, Zoueïratt. Regroupés à Jreïda, ils y sont jugés par une cour spéciale de justice. Le 3 décembre 1987, à l'issue d'une audience de 16 jours, la cour spéciale rend son verdict. Il est sans appel ; de très lourdes condamnations sont prononcées ; trois peines capitales sont retenues contre les lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou et Bâ Seydi. Tous les efforts déployés par diverses personnalités étrangères pour surseoir à leur exécution, ou obtenir la commutation de leurs peines, ayant rencontré une fin de non recevoir du Colonel Taya, ils furent passés par les armes le 06 décembre 1987, à l'aube, à quelques mètres au sud-ouest de la base militaire de Jreïda.

Ils étaient à la fleur de l'âge. Comme beaucoup le firent avant eux et après eux, ils auraient pu, à pas feutrés, «construire leur carrière »… Mais entre les deux termes de l'alternative qui se présentait à eux : la satisfaction du «Moi » et l'avènement d'une cohabitation sur des bases égalitaires entre Noirs et Arabo-berbères, ils avaient choisi le second terme. Car ils avaient conscience que l'épanouissement de leur « Moi » ne pouvait pas être réel, effectif et durable, dans la négation de fait, de l'ensemble que constitue la communauté négro-africaine dont leur « Moi » faisait justement partie intégrante. Les dangers auxquels leur vie était exposée dans l'éventualité d'un échec du putsch, ils en parlaient en septembre 1987 ; soit un mois avant les arrestations, et seulement deux mois avant leur exécution. Ces dangers, ils en avaient donc pleinement conscience ; et ils les assumaient avec une sérénité toute éblouissante.

Nous ne nous lasserons jamais de le souligner : sur un plan strictement juridique, et en dehors de tout constat objectif d'un début d'exécution, la seule réalité incontestable du coup d'État et l'implication certaine dans sa conception, des lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou et Bâ Seydi, ne justifiaient pas qu'ils fussent exécutés. Pour autant, était-il possible, dans le contexte historique de l'époque, que le peloton d'exécution leur fût épargné par le Colonel Taya ? Quelle est la signification politico-historique du coup d'État d'octobre 1987 des militaires négro-africains ? En quoi fut-il, par rapport à l'exercice du pouvoir politique et à la coexistence entre Arabo-berbères et Négro-africains, un facteur générateur d'une révolution des mentalités ? En quoi, et dans quel sens peut-on dire que l' « ouverture démocratique » amorcée en 1991/1992, on la doit aussi à nos trois premiers martyrs (Sarr Amoudou, Sy Saïdou, Bâ Seydi) tombés sous les balles du peloton d'exécution, et au sang de toutes les victimes négro-africaines de 1989 à 1991 ?

6 décembre 1987, 6 décembre 2001 : 14 ans après l'exécution de nos trois premiers martyrs, nous tenterons, en guise de commémoration, et pour leur rendre un ultime hommage, d'apporter quelques éléments de réponse à ces questions et à certaines autres qui leur sont connexes.

La dimension politico-historique du coup d'État d'octobre 1987 des militaires négro-africains.

1. Dimension politique

Le 10 juillet 1978 l'armée prend le pouvoir. Le Colonel Salek dirige l'État mauritanien. De cette date à nos jours, les statistiques dont nous disposons révèlent pas moins de douze coups d'État conduits avec succès ou déjoués avant ou en cours d'exécution ; connus ou inconnus du grand public ; opérés avec force ou en douceur sous forme de révolution de palais. De ces douze putschs, retenons-en les cinq qui ont été conduits jusqu'au bout, et qui ont abouti à un changement à la direction de l'État mauritanien. Il s'agit de ceux qui ont vu l'accession au pouvoir des Colonels Salek, Louly, Bouceïf, Haïdallah et Taya. Excepté le Colonel Moustapha ould Salek (qui ne conserva pas longtemps le pouvoir), aucun de ces hommes portés au pouvoir par un putsch n'était véritablement porteur ni d'un projet de société ni d'un programme politique nouveau. Les véritables mobiles de leur putsch, ne se posaient donc pas en termes de rupture avec une orientation politique de leur prédécesseur. Il ne s'agissait ni plus ni moins que d'un changement dans la continuité. Changement ? Changement d'hommes - très souvent accompagné d'un changement de leur identité tribale ou régionale - à la direction de l'État. Continuité ? Dans le sens du maintien, dans ce qu'elles avaient de fondamental, des options politiques du prédécesseur ; de ses pratiques et méthodes de gouvernement.

Ainsi, en termes de nouvelle orientation politique, il n'y eut réellement de rupture significative avec le passé qu'en 1978, avec la prise du pouvoir du colonel Salek. Son programme politique proclamé et mis en œuvre, même s'il ne s'attaquait pas au racisme d'État, avait le mérite d'exister. On s'en souvient, il s'articulait autour de trois points dont les deux principaux étaient : « Arrêt de la guerre » contre le Front Polisario, (Guerre absurde à laquelle ni l'armée ni le pays n'étaient préparés). « Redressement de l'économie » (qui était à genoux au bout de trois années de guerre).

Le changement des hommes à la tête du pays ainsi que celui de l'appartenance tribale ou régionale du nouveau maître du pays s'opéraient et s'inscrivaient dans une logique de continuité absolue par rapport au monopole du pouvoir politique par les Arabo-berbères. Autrement dit, il restait maintenu et sauvegardé, ce statu quo qui consacre de fait la domination écrasante des Arabo-berbères et l'exclusion des Négro-africains. Telles étaient les caractéristiques principales des coups d'État qui eurent lieu dans le pays. Le coup d'État des militaires noirs, déjoué en octobre 1987, met fin à cette tradition de changement dans la continuité. Lui, se présentait en termes de rupture absolue avec tout ce que, en matière de coup d'État, le pays avait connu jusque là. L'expression de cette rupture se définissait par l'originalité de sa conception technique et opérationnelle, mais aussi et surtout par son contenu politique dont ses auteurs étaient porteurs. En effet, pour la première fois dans l'histoire politique du pays, par le biais d'un putsch, l'alternance au sommet de l'État était envisagée, et en voie d'être réalisée. Il va sans dire qu'il ne s'agissait point d'une alternance au sens d'un renouvellement des hommes à la tête de l'État ; renouvellement toujours confiné au sein de la communauté arabo-berbères ; il s'agissait plutôt, disons-le clairement, d'une alternance perçue sous forme d'un transfert du contrôle politique de l'État, de la communauté arabo-berbère vers la communauté négro-africaine. Ne s'agissait-il pas alors, pourrait-on dire, d'instaurer un nouveau monopole du pouvoir politique, qui, cette fois, serait au profit des Négro-africains ?Non, parce que ce serait substituer une aberration politique à une autre ; une injustice à une autre.

Cette alternance politique, précisons-le aussi, n'était pas considérée comme une fin en soi. Elle devait tout naturellement constituer une transition devant aboutir à un exercice conjoint, et non unidimensionnel du pouvoir politique en Mauritanie. Dès lors, il apparaît clairement que ce qui était mis en cause et ciblé, c'était bien le statu quo politique patiemment élaboré et établi depuis l'indépendance ; c'était le caractère raciste de l'État mauritanien. C'est en cela, nous semble-t-il, que réside la véritable dimension politique du coup d'État du 22 octobre 1987. Et c'est parce que les lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou, et Bâ Seïdy symbolisaient cette dimension politique du coup d'État d'octobre 1987, qu'il était difficile que Taya leur épargnât le peloton d'exécution. Il eut fallu, pour qu'il en fût autrement, qu'il fût animé par la double volonté politique suivante : remettre en question le monopole du pouvoir politique par les Arabo-berbères. Mettre en perspective une cohabitation des deux communautés sur la base d'un partage du pouvoir politique

2. Dimension historique

Mais la mise en cause du système politique raciste en Mauritanie a un passé, une histoire. Son processus a connu trois phases majeures.

Acte I : Il se situe à la veille de l'indépendance (déjà !). Des voix s'élèvent, au sein de certaines organisations négro-africaines, pour exprimer des appréhensions quant à une cohabitation entre Arabo-berbères et Négro-africains dans le cadre d'un État unitaire.

Acte II : 1966. Un peu plus de 6 ans après la prophétie de leurs aînés sur le devenir de l'entité négro-africaine en Mauritanie, et comme pour leur donner raison a posteriori, 19 cadres négro-africains publient un document historique. Ils y dénoncent systématiquement la discrimination raciale déjà en œuvre, notamment dans l'enseignement.

Acte III. Vingt ans après, en 1986, les Flam publient le Manifeste du Négro-mauritanien opprimé. Il actualise et approfondit la dénonciation du système politique raciste, à la lumière des données nouvelles nées de la généralisation et de l'accentuation de l'exclusion des Négro-africains.

Le coup d'État des militaires négro-africains, déjoué le 22 octobre 1987, ne peut donc pas être perçu comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Il n'est pas un phénomène fortuit. Il est le produit de la généralisation et de l'enracinement du racisme d'État. Aussi s'inscrit-il tout naturellement dans une continuité historique de la campagne de dénonciation et de lutte contre le système politique raciste, lancée 21 ans plus tôt. Il en constitue à la fois l'aboutissement et le prolongement. Il en est l'Acte IV. C'est tout cela qui lui confère sa dimension historique.

Le coup d'État du 22 octobre 1987 en tant que vecteur d'une révolution des mentalités…

L'injustice et l'oppression appellent toujours la résistance. Cela est amplement attesté par l'histoire. Dans le contexte mauritanien, cette loi s'est vérifiée aussi. D'abord pressenti, le racisme d'État fut aussitôt dénoncé, dès son instauration ; ainsi que nous venons de le voir plus haut. Mais le paradoxe dans le cas mauritanien fut que la résistance est restée longtemps sans être, en termes d'intensité et de continuité, à la mesure de l'ampleur de la discrimination raciale. En d'autres termes, tandis que le racisme d'État s'installait, se généralisait, s'enracinait, la résistance qu'il appelait, elle, quand elle n'était pas absente (de 1967 à la fin des années 1970), ne se manifestait que sporadiquement (1966 et 1986) à travers le document des «19» et le Manifeste des Flam. Ponctuée par des moments de silence, d'éclipse, la lutte contre le racisme d'État a revêtu, jusqu'en 1986, un caractère à la fois « pacifique » et « défensif ». Son caractère « pacifique » consistait en ce qu'elle ne s'exprimait que sous la forme de stigmatisation du racisme d'État à travers des documents. Son caractère « défensif » consistait en ce qu'elle réagissait beaucoup plus à l'enracinement du racisme d'État qu'elle n'anticipait son évolution.

Si cet état de choses perturbait le sommeil des tenants du système raciste, il ne les empêchait pas pour autant de dormir ; le contrôle de l'État restait entre leurs mains ; il assurait la pérennité du racisme d'État. Les choses, sur ce plan, changent en 1987. La lutte contre le racisme monte d'un cran. Elle enregistre un bon qualitatif. Elle se présente en termes « violents », étant entendu que même mené en douceur, sans effusion de sang, un coup d'État comporte toujours un aspect contraignant, coercitif. Dès lors, nous n'avons plus, ici, affaire à une dénonciation du racisme d'État. Il s'agit de conquérir le Pouvoir, pour débarrasser l'État de son caractère raciste… Ce passage inattendu, « brusque », de l'étape de dénonciation du racisme, à la volonté affichée de prendre le pouvoir, fut la nouvelle donnée qui, soudainement, bouleversa la perception que les uns et les autres, au sein des deux communautés, avaient du droit à l'exercice du Pouvoir en Mauritanie.

En effet, une loi non écrite, mais bien établie dans le subconscient de bon nombre de Mauritaniens (y compris l'élite) des deux communautés, présentait l'État comme la propriété exclusive des Arabo-berbères, auxquels revenait le « droit » de le diriger. Dans les faits, nous l'avons vu, l'exercice du pouvoir politique s'est toujours effectué conformément à cette loi non écrite. A cet égard la réflexion qui, en 1992, échappe de la bouche du chef d'un parti politique, est fort édifiante : « Les Négro-africains, disait-il, ne représentent que 20 % de la population, par conséquent, ils ne doivent pas diriger le pays. » Par ces propos, ce responsable politique obtus montre qu'il n'a rien compris à la signification politique du coup d'État d'octobre 1987 ; en même temps, il confirme la réalité de cette loi non écrite qui fait du Négro-africain un citoyen dépossédé du droit d'accéder à la plus haute charge de l'État. C'est précisément cette loi tacite que le coup d'État des militaires noirs d'octobre 1987 a tuée. En effet, par rapport à cette loi tacite, le putsch du 22 octobre 1987, même déjoué, constituait un message clair. Il signifiait aux uns que l'État devait être au service de tous les mauritaniens ; que sa direction devait être, soit légalement ouverte à tous les Mauritaniens quelle que fût leur appartenance communautaire, soit conquise par la force. Aux autres, il signifiait qu'en matière d'exercice du pouvoir, il n'y avait pas de fatalité ; qu'en Mauritanie, il ne devait pas y avoir une communauté faite pour gouverner et une autre née pour être gouvernée. C'est le contenu de ce message qui, passé les moments d'effroi, d'émoi et de stupeur, s'est incrusté dans les esprits, au lendemain du coup d'État du 22 octobre 1987.

Une nouvelle perception du pouvoir, de son exercice, était brusquement née ; un nouvel état d'esprit aussi… même si on ne l'avouait pas. Les lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou et Bâ Seydi furent crucifiés, et leurs compagnons damnés, parce que le coup d'État du 22 octobre 1987, dont ils étaient les auteurs, marquait la naissance d'un processus qui tuait brutalement ce qui, dans le système politique raciste, faisait de l'État en Mauritanie, la « chose héréditaire » au sein de la communauté arabo-berbère ; c'est-à-dire cette idée, cette mentalité selon laquelle, seul l'Arabo-berbè re devait gouverner la Mauritanie… Et ce processus-là, il fallait l'arrêter. Il ne fallait pas qu'il eût des continuateurs.

« L'ouverture démocratique » en cours en Mauritanie tire ses racines d'un contexte fertilisé par le sang de nos martyrs et arrosé par les larmes de la communauté négro-africaine. À partir du 22 octobre 1987, le régime du colonel Taya s'employa farouchement à dissuader, à décourager toute tentative d'éradication du racisme d'État. La logique macabre d'extermination des Négro-africains est mise en marche. Elle ne s'arrêtera plus, pendant quatre ans. 6 décembre 1987. Les lieutenants Sarr, Sy et Bâ sont exécutés. À Oualata, entre le 26 août et le 13 septembre 1988, Bâ Alassane Oumar, Ten Youssouf Guéye, Bâ Abdoul Khoudouss et Djigo Tabssirou meurent dans des conditions de détention inhumaines. 1989. Le conflit sénégalo-mauritanien, s'il na pas été délibérément provoqué par le régime de Taya, fut largement mis à profit pour déporter des milliers négro-africains au Sénégal et au Mali. 1990/1991. Accusés de complot, des centaines de militaires noirs sont arrêtés, torturés, écartelés, tués froidement. Au sein des forces armées et de l'administration, les Noirs sont épiés, traqués, ciblés. Pendant quatre ans, les Noirs subiront le martyre du fait de la logique d'extermination du colonel Taya. Or, cette politique d'extermination impliquait nécessairement des violations des droits humains à une grande échelle. Elles eurent lieu, et furent si massives et graves qu'elles suscitèrent la ferme condamnation de la communauté internationale. En effet, les violations des droits humains, l'environnement international ne les supportait plus. Les temps avaient changé. Il n'y avait que les despotes tournés vers le passé qui ne l'avaient pas compris… L'empire soviétique s'engageait dans l'éclatement, entraînant la fin de la guerre froide et le déclin des autres régimes totalitaires. Le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États cédait peu à peu la place à la notion naissante du devoir d'ingérence. Le vent de la démocratisation balayait tous les continents. Tout, tant sur le plan intérieur, qu'international, était réuni, pour isoler, étouffer le régime raciste et tyrannique du colonel Taya. Pour desserrer l'étau, il n'avait d'autres choix que celui de se mettre à la « mode » du temps : amorcer une « ouverture démocratique ». C'est ce qu'il fit. Pas par conviction ni par adhésion aux valeurs de la démocratie. Il le fit pour préserver son trône, pour reculer l'échéance de sa chute.

Le 14ème anniversaire de l'exécution des lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou et Bâ Seydi intervient juste après les élections législatives et municipales. Avec plus de dix sièges, l'opposition fait une entrée remarquée à l'assemblée nationale. Elle gagne aussi plusieurs communes importantes. Ces victoires de l'opposition (une partie de l'opposition) , sont-elles le fait d'un dysfonctionnement du mécanisme de la fraude ? Ont-elles été programmées par le régime pour crédibiliser les élections et justifier la stratégie de participation de l'opposition à ces élections. Il est encore trop tôt pour apporter des réponses à ces questions. En tout état de cause, le régime du colonel Taya reste fondamentalement raciste, esclavagiste et despotique. Il ne peut pas conduire une véritable démocratisation du pays. La preuve : dix ans après sa mise en œuvre, l' « ouverture démocratique » balbutie toujours…Et les problèmes majeurs, à l'origine de cette « ouverture démocratique » restent entiers : le racisme d'État ; la cohabitation entre Arabo-berbères et Négro-africains ; le partage du pouvoir ; l'État unitaire, ou l'autonomie dans le cadre d'un État fédéral ; l'enquête sur les violations des droits de l'homme ; le sort des auteurs de ces violations des droits de l'homme…

L'exécution, le 6 décembre 1987, des lieutenants Sarr Amadou, Sy Saïdou, Bâ Seydi, et le massacre de plusieurs centaines de Noirs, civils et militaires, entre 1989 et 1991, ont actualisé certaines de ces questions et posé d'autres. Il nous appartient, à défaut de les résoudre, de nous prononcer clairement sur ces questions. Nous devons le faire par devoir de mémoire. Nous devons le faire par amour pour la Mauritanie et pour son devenir. Car tant que ces questions ne sont pas résolues sur des bases justes, le pays est en danger…Qu'Allah accueille dans son paradis tous ceux qui, de 1987 à 199, sont morts à cause de ces problèmes.

Pour louer les qualités d'une personne ou ses faits d'armes, nous avons coutume, dans nos sociétés négro-africaines, de prononcer de façon appuyée et répétitive son nom de famille.

A l'adresse de nos trois premiers martyrs, je dis : Sarr Amadou, « seydi » Sarr ! Sy Saïdou, «seydi» Sy ! Bâ Seydi, «seydi» Bâ ! Que vos âmes reposent en paix.

6 décembre 2001 sur FLAMNET  (6 décembre 2008, nouvelle publication sur le site Avomm) Boye Alassane Harouna
 
Source: Mamadou Sy

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