La
force du président Aziz c’est sa témérité. Son courage, diront ses
admirateurs. Sa « folie » (des grandeurs), rétorqueront ses opposants.
Qu’on l’aime ou pas, il faut reconnaître que l’homme tire un grand
bénéfice de sa propension à agir. A ses collaborateurs, il dit : faites
et puis on verra après !
J’étais de ceux qui pensaient qu’organiser un sommet de la Ligue arabe à Nouakchott était une folie. A plusieurs points de vue. Mes raisons ?
Nouakchott n’est pas une ville, au sens où l’entendent nos frères du
Machrek et du Maghreb. Les premiers avaient converti (enfoui) leurs
pétrodollars en villes qui concurrencent, du point de vue architecture,
équipements, loisirs et plaisir, les plus grandes cités d’Europe et
d’Amérique. Les seconds (Marocains, Algériens, Tunisiens) se confondent,
à nos yeux, avec nos « ancêtres les Gaulois ». Comment alors penser
inviter tout ce beau monde à Nouakchott et, sans peser le pour et le
contre, passer à l’acte. Aziz l’a fait.
A voir le déroulement du 27ème sommet de la Ligue arabe, on voit bien que c’est un coup gagnant. « Nous organiserons ce sommet, même sous la tente
», avait dit le président Aziz. Et, effectivement, une tente
gigantesque a été dressée dans l’enceinte du Palais des congrès de
Nouakchott pour accueillir les réunions du « sommeil » de la Ligue
arabe.
Cette infrastructure de
fortune a coûté une fortune : 700 millions d’ouvrages (2,5 millions de
dollars US), rapportent certains médias. Mais qu’importe ! Organiser le
premier sommet de la Ligue arabe à Nouakchott dans l’histoire du pays
n’a pas de prix. Les 22 pays membres sont là. Si les mauritaniens
déplorent l’absence de plusieurs têtes couronnées (Salman d’Arabie
saoudite, Mohamed VI du Maroc, Qabous d’Oman, Abdalla II de Jordanie,
etc) et de présidents qui comptent (Egypte, Tunisie), d’autres ont tenu à
honorer leur hôte mauritanien (l’émir Temim du Qatar, l’émir du
Koweït). C’est un succès diplomatique notoire. Et certainement une bonne
perspective pour les investissements en Mauritanie. Ces deux pays
comptent en effet beaucoup pour Nouakchott étant de ceux qui, avec
l’Arabie saoudite, lui ont permis de faire face à la crise économique
consécutive à la chute des prix des matières premières (fer, or, cuivre)
depuis 2014.
Autre coup gagnant : l’ouverture, un mois avant ce sommet, du nouvel aéroport international de Nouakchott « Oumtounsi ».
C’est l’occasion pour le gouvernement de couper court à toutes les
critiques sur la réalisation de cette infrastructure qui aurait coûté,
selon certaines estimations, près de 300 millions de dollars US. Si la
Mauritanie ne disposait pas d’un tel aéroport, elle devait attendre
encore longtemps avant d’envisager l’accueil d’un tel sommet.
Le dernier coup gagnant du président Aziz est d’avoir profité de
l’organisation de ce sommet pour mettre à niveau certaines
infrastructures de la capitale.
Certes, on ne sait quelles sommes ont été engagées dans cette opération
également suspectée de forts relents de gabegie, mais les Nouakchottois
sont contents que leur ville ressemble enfin, dans sa partie « utile » à
quelque chose. Ce travail « dans l’urgence » a été mitraillé par une
opposition qui, faute de dialogue, ne manque aucune occasion pour tirer à
boulets rouges sur un pouvoir qui lui rend « au double » sa monnaie.
Globalement donc, le sommet de Nouakchott est une réussite. La
Mauritanie aura eu son « tour » et prouvé qu’elle peut organiser une
grande rencontre. Les « frères » arabes sont venus, ont vu et l’on
espère qu’ils reviendront pour investir. Enfin, Aziz a joué et gagné :
jusqu’au prochain sommet, il se présentera comme le « chef » des Arabes,
comme il l’a été, en 2014, pour les Africains.
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