vendredi 9 septembre 2011

Libye : Les «10 commandements» de l’Ua aux rebelles.



L'Union africaine a posé des conditions pour la reconnaissance du Comité national de transition libyen. Parmi ces conditions, il y a la formation d'un gouvernement représentatif de la Libye et l'arrêt des tortures contre les Noirs libyens et africains vivant dans ce pays. Mais Jean Ping a annoncé lors de sa conférence qu'il a reçu une lettre du Cnt qui satisfait ces exigences-là.

La Feuille de route

‘L'Union africaine s'est prononcée sur la crise libyenne le 10 mars, c'est-à-dire deux jours avant que l'Union européenne ne se prononce, un jour avant que la Ligue arabe ne se prononce, et sept jours avant que le Conseil de sécurité n'adopte la résolution 1973. 

L'Union africaine a présenté une feuille de route bien connue de ceux qui ont voulu l'écouter. Cette feuille de route était présentée en cinq points.
Mais disons que les points les plus importants sont : la cessation immédiate des hostilités ; deuxièmement un gouvernement d'union nationale destiné à préparer les institutions, à préparer les instruments nécessaires en vue de rendre la parole aux Libyens (...). L'objectif ultime de la feuille de l'Union africaine, c'est la démocratie, l'Etat de droit, de justice. Voilà depuis le 10 mars que nous disons qu'on veut changer le système. Il y en a ceux qui (la Communauté internationale, Ndlr) veulent enlever deux ou trois hommes. Nous, nous disons qu'on veut changer le système.

Il faut que la Libye devienne un Etat démocratique. Nous le disons depuis le 10 mars. Vous savez que jusque-là, la Libye n'a pas de Constitution, de partis politiques, d'institutions, de syndicats. Rien de tout cela. Seul le ‘livre Vert’ faisait référence de Constitution.

‘Nous pensons qu'il faudrait une autorité de transition qui préparerait la nouvelle Constitution et tout ce qui est nécessaire pour aller aux élections. C'est ce que nous faisons partout : àMadagascar, en Guinée, etc. : Restaurer la démocratie passe par cette feuille de route. Nous l'avons dit sur la base de notre expérience. 

Le 17 mars, il y a eu la résolution 1973 du Conseil de sécurité. Les trois pays africains, membres de ce Conseil de sécurité, ont voté cette résolution : Le Nigeria, le Gabon et l'Afrique du Sud. Le Brésil, l'Inde, la Russie, la Chine ne l'ont pas votée. (…). Aujourd'hui, maintenant, les autres viennent prendre notre feuille de route pour nous dire : ‘Allons-y !’. Nous, nous y sommes depuis le 10 mars. Seuls les Turcs avaient une feuille de route proche de la nôtre. Tous les autres n'en avaient pas. Leur feuille de route, c'est : ‘Bombardons, on verra après’ (...).

‘Nous étions au sommet de Malabo où nous avons présenté notre feuille de route améliorée aux deux parties, avec un préambule qui dit clairement que Kadhafi ne fera pas partie des négociations. Nous avons remis cette feuille de route au gouvernement de Tripoli et celui deBenghazi pour qu'ils nous donnent des réponses appropriées. Nous travaillons avec tout le monde pour arriver à une solution de sortie de crise.

‘Maintenant la résolution 1973 a pris la décision de mettre en place une zone d'exclusion aérienne. L'Otan a été chargée des bombardements. Nous, nous attendions parce qu'après la fin des bombardements, on reviendra à la table des négociations. Est-ce que nous avons eu tort d'avoir eu raison très tôt ? (…).’

En Libye, c'est une guerre civile

‘Je voudrai vous dire que le 23 février, nous avons condamné les brutalités exercées sur les manifestants libyens. Nous avons condamné l'usage excessif de la force et d'armes mortelles. Deux communiqués ont été diffusés, mais tout le monde semble l'ignorer. Vous (les journalistes, Ndlr) n'avez rien dit à cette époque-là. 
Et puis nous nous sommes rendu compte que contrairement à ce qui s'est passé en Tunisieet en Egypte où c'était des manifestations populaires et pacifiques, que nous avons reconnues et accompagnées parce que nous avions estimé que c'était des révolutions légitimes même s'il n'y avait pas de légitimité. La révolution libyenne n'était pas semblable au cas tunisien et égyptien.

Là, il y avait une guerre civile et nous craignions, compte tenu de notre propre expérience, la guerre civile, la partition du pays, la ‘somalisation’. N'oubliez pas que c'est arrivé en Somaliedéjà ! N'oubliez pas que c'est arrivé en Irak !

N'oubliez pas que c'est arrivé ailleurs ! Chat échaudé craint même l'eau froide. Nous avons pris donc des mesures pour éviter ça. Le 10 et 11 avril, je me suis rendu avec cinq chefs d'Etat àTripoli et à Benghazi. Personne d'autre n'avait fait ça. Sous les bombardements de l'Otan, nous avons demandé de nous laisser passer. Il y a des gens qui ont affirmé qu'on a été àTripoli et pas à Benghazi. (…).

‘Nous y sommes rendus pour leur demander d'accepter la feuille de route et de l'appliquer. Puis le 30 juin, nous avons sorti le document que vous connaissez. Le 26 août au dernier sommet d'Addis Abéba, le paragraphe 6 du communiqué issue de ce sommet dit ceci :‘Encourage les parties libyennes au processus devant mener à la formation d'un gouvernement inclusif qui sera le bienvenu pour occuper le siège de la Libye à l'Ua. Cela veut dire quoi ? Cela veut dire que la Libye est fondateur de l'Union africaine. Personne ne peut lui enlever ce droit. Personne ne peut l'exclure.

Seulement, qui siégeait à l'Union africaine pour le compte de la Libye ? C'est le gouvernement de Tripoli. Or, dans ce paragraphe 6 du communiqué, on a dit clairement que ce ne sera plus lui. On attend que la transition vienne. On écrit partout le contraire de ce que j'ai là.

C'est grave de mentir parce que cela a été repris par tout le monde. Quand nous demandons à la France 24, ils nous disent que c'est Le Figaro. Nous demandons au Figaro, c'est Al Jesira. On demande à Al Jesira, c'est Reuters. (Le confrère d'Al Jesira, présent dans la salle, soutient que c'est l'Afp et apporte les dépêches de cette agence, Ndlr). C'est l'Afp qui ment ? Je viens du Caire où tous les journaux arabes ont repris ça. C'est-à-dire un mensonge qui ne correspond pas à ce que j'aurais dit – parce que je n'ai rien dit – ni à ce que je pense – parce que c'est le contraire – ni à ce qui a été écrit dans le communiqué.’

Ce que l'Union africaine demande au Cnt

‘Qu'est-ce que nous demandions à cette époque comme garantie (pour occuper le siège de la Libye à l'Union africaine, Ndlr) ? Nous voulions un gouvernement représentatif de laLibye, qui se désolidarise des tortures, des assassinats contre les Noirs. Personne n'en parlait jusque-là. Pourtant, dans nos communiqués, c'est dit depuis le 10 mars. On disait des choses simples. Il n'y a pas de mercenaires en Libye, c'est sûr. Beaucoup sont noirs, c'est sûr. 

Mais il n'y a pas que des Noirs. Parfois on les appelle des conseillers techniques quand ils sont Blancs. Mais tous les Noirs ne sont pas des mercenaires parce qu'un tiers de la population de la Libye sont des Noirs. Si tous les Noirs deviennent des mercenaires, cela veut dire que un tiers des Noirs libyens sont des mercenaires. Donc des Libyens seraient des mercenaires chez eux.

‘D'autre part, il y a de paisibles gens qui sont là-bas depuis de longues dates. Des dizaines des milliers d'Africains qui travaillent là-bas. Ces gens n'ont rien à voir avec les mercenaires. Ils fuient même les combats et se noient en mer parce que personne ne veut venir à leur secours. Qu'avons-nous fait à l'humanité pour être traités comme ça ? Nous disons : ‘Rassurez-nous sur cette question !’. Nous avons déjà reçu une lettre. Elle vient duConseil national de la transition (Cnt).

Elle est signée par Mohamed Jibril où il nous rassure sur les questions qui nous inquiétaient. C'est ce que nous demandions. Est-ce un péché de demander ce que vous demandez après avoir été reconnu ? Vous (la communauté internationale, Ndlr) demandez la même chose ! Sauf ce qui arrive aux Noirs parce que ça n'intéresse personne. Est-ce qu'il y a un péché à le demander. Nous indiquons clairement que nous sommes du côté du peuple libyen. (…).

Ce sera une décision des chefs d'Etat. Il appartient aux chefs d'Etat, à la lumière des informations que nous allons leur communiquer, de prendre la décision. (…). Les décisions ne sont pas prises par moi. Elles sont prises par une instance formée de chefs d'Etat. Nous allons faire un rapport à cette instance (la Conférence des chefs d'Etat, Ndlr).’

Aucun sou de Kadhafi n'était placé en Afrique

‘On nous a dit : ‘Vous êtes payés par l'Etat libyen’. Ils vous donnent de l'argent. Vous faites la queue à Tripoli pour demander de l'argent. Aujourd'hui, vous affirmez qu'il y a 150 milliards de dollars libyens. Où sont-ils ces milliards ? Sont-ils en Afrique ? On est en train de les dégeler maintenant. On les dégèle d'où ? Des banques africaines ? L'argent de Kadhafi était placé chez qui ? Les 70 milliards de la Libyan Investisment Authority sont placés où ?

Aucun de ces sous n'était placé en Afrique. Il suffit de lire sur Internet pour savoir qu'ils étaient à Hsbc, à la Goldman Sachs, à la Société Générale, et une partie était placée dans des actions de grandes compagnies en Europe et l'autre partie a servi à acheter des immeubles au Royaume Uni. Où est l'Afrique là-dedans ? C'est vrai que cinq milliards de l'Icoétaient consacrés aux investissements en Afrique : achats d'hôtels, achats de stations service. Mais tous les pays arabes achètent des stations d'essence d'abord en Europe et auxEtats-unis.

C'était donc un péché que d'aller acheter des stations d'essence en Afrique lorsque vous en avez déjà achetées en Europe et ailleurs ? C’étaient des investissements qui devraient être, théoriquement, productifs. Donc cinq milliards prévus en Afrique et 70 milliards ailleurs contre 150 milliards qui se baladent. Est-ce que nous demandons une part du pétrole libyen ? Nous ne demandons rien à la Libye. Qu'avons-nous fait de si condamnable dans ces circonstances-là ?’

Le Cnt doit se désolidarise des actes d'assassinat des Noirs

Lorsque je lis la presse française et occidentale, on nous dit que le Cnt, qui est créé le 17 février, était composé de loyalistes, d'anciens collaborateurs de Kadhafi, d'Al Qaïda, de Salafistes, de vrais démocrates, de sociétés civiles, d'avocats. Et on nous dit, en les lisant, que le seul point commun qu'ils avaient, c'est qu'ils détestaient Kadhafi. Alors nous nous sommes demandés : Est-ce que ça suffit pour faire un programme ? Aujourd'hui, le Cnt a pris de la crédibilité, de l'envergure, et s'achemine vers, ce que nous considérions, comme un gouvernement représentatif de la Libye.

Si on égorge des Noirs, nous n'avons pas dit que c'est la faute du Cnt. Nous avons dit que leCnt doit se désolidariser de ces actes, les condamner et veiller à ce que cela ne se reproduise pas. La Libye, qu'on l'aime ou pas, est en Afrique. Que cela plaise ou pas, elle est enAfrique. On ne pourra pas déplacer la Libye dans l'Océan indien ni même à côté de voisins agréables comme le Qatar. (…).’

Rassemblés par M. Barry



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