lundi 14 septembre 2015

Au nom de ma France, je vous arrête mon colonel Beibacar...

Juste un mot malheureux, juste une phrase qui frise la mauvaise foi. Il est clair que la France n’a jamais engagé avec la société féodale mauritanienne un bras de fer radical contre l’esclavage. Comme le rappelle le colonel, la France s’est contentée de ne pas cautionner la vente d’esclave et d’offrir un abri à ceux qui fuyaient leurs maîtres. Mais de là à dire que la France « a une très grande part de responsabilité dans la consolidation de l’esclavage en Mauritanie », c’est historiquement faux !

Consolidation signifie qu’avant la France, l’esclavage en Mauritanie était bancal, frêle alors qu’il était plus solide que jamais vieux de plusieurs siècles ! Les esclaves en Mauritanie peuvent être heureux de l’arrivée du colon et certains n’y s’y sont pas trompés en disant préférer les maîtres de leurs maîtres… 

La politique coloniale française en Mauritanie ne fut pas celle de la Belgique au Congo, il faut arrêter de dire n’importe quoi. La Mauritanie n’a jamais vraiment intéressé la France car ce territoire n’était qu’un vaste désert peuplé d’admirables misérables coupés du monde, se pillant les uns les autres à l’occasion. Le sol semblait aussi pauvre que ses habitants. Ce n’est que pour protéger le commerce qu’il a bien fallu aux français pacifier ces tribus et faire régner la paix et la même justice pour tous.

Le pauvre Coppolani est le dernier qui méritait d’être tué car il pensait que la France pouvait réussir sa pacification pacifiquement soit, pour simplifier, selon une célèbre formule : pas besoin d’armes, juste de l’argent… Aussi la France a tout fait pour essayer de ne pas trop bouleverser l’ordre établi surtout que si tous les esclaves étaient libérés personne n’aurait su  quoi en faire ni comment les occuper ni comment les nourrir. C’est triste à dire mais c’est vrai.

Cela dit la présence française a permis bien des révolutions culturelles. Ne serait-ce que le nouveau respect dû à quiconque travaillait avec cette administration, du goumier à l’interprète et tout ce beau monde ne sortait pas toujours des plus grandes tentes. 


Quant à l’exemple des écoles des fils de chefs dont parle le colonel pour montrer que la France « a une très grande part de responsabilité dans la consolidation de l’esclavage en Mauritanie, à cause de sa grande tolérance, de son indulgence et de sa bienveillance à l’égard du lobby féodal mauritanien, son partenaire, son complice, qu’elle n’a pas soumis au décret du 12-12-1905 dont la colonie de Mauritanie fut la seule exemptée tacitement.  »

Il oublie de dire que ces écoles sont les filles aînées de l’école des otages de Faidherbe. Tout était dit… Mais le colonel ne dit pas qu’à côté de ces écoles des fils de chefs, et (au Sénégal) des interprètes, il y avait les écoles du village où tout le monde pouvait aller et le captif et le hartani. N’est-ce pas mieux que rien ? Combien de h’ratines ont pu faire des études, devenir enseignants et plus après être passés d’abord par ces écoles du village comme on en trouvait un peu partout notamment à Boutilimit avant le cours élémentaire qui allait en finir avec cette discrimination.

Quant aux fils de chefs, leurs pères ne voulaient pas les envoyer à l’école du blanc de peur de finir acculturés et souvent au début ils y envoyaient des hratines et autres mulâtres ou même des captifs avant de se rendre compte du danger d’éduquer les castés et garder dans l’ignorance les fils de chefs. Les hratines et toute la Mauritanie moderne peuvent se féliciter qu’il y ait eu cette école des fils de chefs ne serait-ce que pour sauver les fils de chefs de cet enseignement bloqué à tous les niveaux au 16ème siècle selon de nombreux chercheurs notamment le professeur Abdel Wedoud Ould Cheikh. Cela a permis à toute une génération d’avoir les moyens d’avoir accès au savoir et au monde moderne pour ce qu’il était à l’époque jusqu’à nos jours.

http://chezvlane.blogspot.com/2015/06/pr-abdel-wedoud-ould-cheikh-envoie-aux.html

On ne dit pas que le projet de la France était de civiliser ce beau monde, la vocation première de cette éducation était de former des auxiliaires et des amis de la France qui construisaient avec elle la Mauritanie à partir de rien sinon des tribus souvent ennemies les unes des autres coupées du monde refusant toute autorité centralisée sinon celle du plus fort à l’occasion.

Quant à cette France que certains malveillants rétroviseurs accusent de tous les maux, c’était la France coloniale, la France d’il y a un siècle.  En métropole, les français ne se lavaient pas tous les jours, les femmes n’avaient pas droit de vote et l'élection présidentielle au suffrage universel direct n’existait pas etc. Un peu d’indulgence aussi surtout que la colonisation française en Mauritanie fut constructive malgré les pertes à savoir tous les résistants morts pour défendre leurs intérêts et rester maîtres chacun dans son coin notamment maîtres du désordre établi esclavage compris. 

Pour cette France, à cette époque, La Mauritanie ne comptait pour rien et n’eût été la passion pour le pays de certains aventuriers comme Frèrejean et autres Gouraud peut-être que la Mauritanie n’eût jamais été pacifiée. Il faudra un jour regarder cette histoire avec un autre regard que celui de la haine et de la falsification de l’histoire car la naissance de la Mauritanie est une audacieuse aventure improbable qui aurait pu mieux continuer sans en arriver là où nous en sommes, la haine distillée partout entre les races, les ethnies, les tribus, jusqu’à la haine du français alors que cela n’existait pas comme ça avant les  intellectuels terroristes qui sont responsables de cette situation.

Quant aux h'ratines dans tout ça, eux en premier doivent dire merci à la France et à tous ceux qui ont participé avec elle aux fondations de la Mauritanie pacifiée. Combien ont pu faire des études brillantes grâce aux bienfaits de la pacification ? Même les fils de chefs qui ont été les premiers à partir en France étudier ne doivent-ils pas dire merci d’avoir échappé aux carcans de l’enseignement local ?

Mais surtout les h'ratines doivent dire merci à tous les administrateurs français qui ont écrit sur cette période avec honnêteté pour dire qui étaient nos ancêtres et nos maîtres car en lisant cela le hartani peut regarder avec un sourire bienveillant les fables qu’il reçoit de la part de la littérature indigène où le maître est le grand le beau le fort l’éduqué et les autres les petits les sales, les ignorants etc.

Cette littérature coloniale est un précieux trésor sans lequel le hartani serait condamné à avaler pour l’éternité une histoire qui lui réserve le petit rôle, le rôle vulgaire. La vérité fut tout autre et les photos de nos plus modernes ancêtres et maîtres sont là pour témoigner de la nature de leur existence car aujourd’hui ces grands chefs d’hier et leur suite ont l’air de nos pauvres h'ratines d’aujourd’hui les plus misérables.

Bien sûr l’habit ne fait pas le moine et derrière ces têtes d’un autre temps se tiennent des esprits attachants, fiers et valeureux. J’ai une plus grande admiration pour ces figures qui ont traversé les âges, en restant quasiment aux temps premiers, que pour ce que nous sommes devenus dans la Mauritanie d’aujourd’hui. 

Jadis ils étaient authentiques. Pauvres, misérables tous du maître à l’esclave mais au milieu de ça, il y avait, entre deux coups de feu lointains, de la poésie, de la noblesse d’âme et surtout l’excuse de l’époque. Ils étaient comme leur milieu à deux visages : chauds durs le jour avec toutes les difficultés que cela représentait de vivre en milieu si hostile et frais le soir sous le ciel étoilé où tout était propice à l’élévation de l’âme.

C’était des grands peuples métis qui portaient dans leurs cultures les riches  brassages  de tout le voisinage et l’héritage des grands empires noir, blanc, arabe et berbère. Ils méritent respect et admiration aussi faut-il les regarder avec un œil plein d’humanité et d’humilité.

Aujourd’hui certains veulent falsifier l’histoire et ils y réussissent petit à petit, trompant les descendants de ces chefs-là et les descendants d’esclaves. Il faut combattre ces intellectuels ennemis de la Mauritanie plurielle et doublement authentique, celle qui s’est battue avec le colon vers le progrès en étant admiratif et compréhensif pour l'autre Mauritanie authentique aussi qui s'est battue contre le colon même si ce n'était pas pour tous les mauritaniens mais juste pour rester maîtres de leur territoire respectif même si c’était faire perdurer des temps anciens pleins d’injustices, d’archaïsmes et d’esclavage condamnant tout le monde à rester en arrière du progrès pour finir des villageois de l’arrière-pays marocain, algérien et autres…


Il s’agit de deux faces admirables d’une même culture métisse dont les histoires ont donné  naissance à la Mauritanie. Il faut respecter les deux et ne pas revisiter l’histoire en insultant l’une ou l’autre pour tromper les générations futures...

D’ailleurs en parlant d’histoire et d’esclavage, s’il y a un islamique procès à faire ce n’est pas à la France mais à ceux qui se sont servis de la religion pour faire perdurer l’esclavage jusqu’en 2015 date à laquelle leurs héritiers ont sorti une fatwa déclarant que cette interprétation était désormais abolie.

Qui osera faire ce procès ? Cela signifierait rejoindre Ould Mkheitir… 

Dieu suffit comme témoin...

De là qu’il est plus facile d’accuser la France d’hier au nom de l’impuissance des guerriers d’aujourd’hui…

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