vendredi 22 juin 2012

Le président de la CUN Ahmed Ould Hamza à cœur ouvert à « Le Rénovateur »



jeudi 21 juin 2012
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Toujours égal à lui-même et avec des propos qui tranchent avec les discours , ces temps derniers , de la majorité et de la COD , AHMED OULD HAMZA, président de la CUN , de l’Association des Maires de Mauritanie et de la Fédération des Industries et des Mines et membre du Bureau politique du RFD, nous livre ses impressions sur l’actualité politique en Mauritanie et sur bien d’autres sujets importants .
Le Rénovateur : Des propos prêtés au Président ELY OULD MOHAMED VALL par une certaine presse nieraient l’existence de déportés mauritaniens. Qu’en pensez-vous ? Ahmed Ould Hamza : Cette question est-elle une peau de banane ou cache-t-elle un but inavoué ?
Le Rénovateur : Si l’on vous pose cette question, c’est bien en connaissance de cause et au vu des relations privilégiées qui vous unissent au Président Ely. AOH : Effectivement, le Président Ely compte beaucoup pour moi et pour qui je voue un grand respect et une grande amitié. C’est aussi mon frère. Et cela en dépit du fait que je reste fidèle à mon parti, le RFD. Et pour revenir à votre question, à mon avis, le morceau est très gros et le Président ELY OULD MOHAMED VALL est très fin pour faire avaler une telle couleuvre . Les propos de l’intéressé ont été , sûrement et à dessein , dénaturés et déformés . Et une telle déformation a été médiatisée à outrance . Le Président ELY, en tant que citoyen mauritanien ordinaire et à forte raison en tant que Directeur général de la Sûreté nationale , à l’instar de tout autre Mauritanien , ne pouvait ignorer l’épineuse question des déportés mauritaniens . Je pense que par ses propos, le Président ELY avait voulu , tout simplement , dégager toute responsabilité directe de sa personne dans les opérations de déportation , les exécutions extrajudiciaires et les tortures . Aussi, faut-il le rappeler qu’au sein du corps de la police certains pans ne dépendent pas seulement de la Direction Générale de la sûreté. C’est le cas de la police administrative qui dépend de l’Administration territoriale ( Wali et Hakem) et de la police judiciaire qui relève de l’Administration judiciaire ( parquet) . Ceci n’exclut pas l’existence d’abus commis au niveau des corps constitués, tant civils que militaires, et même au niveau de personnalités civiles . En somme, il s’agit d’une opération politique d’intoxication et de dénigrement visant à ternir l’image du Président ELY . En tout état de cause et comme tout le monde sait , il s’git s’une période sombre et tragique de notre histoire et qui n’a jamais été soldée de façon définitive et équitable . Il est grand temps que tous les Mauritaniens se retrouvent pour clore à jamais ce dossier de façon à panser les plaies et à calmer les esprits .
Le Rénovateur : Au moment où la COD demande au Président AZIZ de dégager du pouvoir , plusieurs initiatives voient le jour . Elles œuvrant au rapprochement de la COD et du régime de AZIZ .Rapprochement qui pourrait prendre la forme d’un dialogue plus inclusif ou la mise en place d’un gouvernement d’Union nationale . Quelle est votre réaction à ces initiatives et que préconisez-vous pour l’apaisement du climat politique dans le pays ? AOH : Permettez-moi , tout d’abord , de saluer toute initiative œuvrant à la stabilité du pays. De telles initiatives sont les bienvenues quelle qu’en soit l’origine. En effet , pour sortir le pays de son impasse politique actuelle , il faudrait que tous les acteurs politiques nationaux , sans exclusive aucune , acceptent de se réunir autour d’une même table pour : - Concrétiser les acquis non négligeables du dernier dialogue national boycotté par mon parti et la COD ;
- Etablir une feuille de route commune exhaustive ciblant les problèmes majeurs auxquels est confronté la Mauritanie, dégageant les solutions idoines et fixant le calendrier de mise en œuvre de ces solutions. Cette mise en œuvre pourrait être confiée à un Gouvernement de large consensus et d’Union nationale. Telle me semblerait être la voie unique et idéale pour surmonter les nombreux défis internes et externes qui hypothèquent la stabilité du pays , son développement et la promotion de sa démocratie . Mais cela suppose que chacune des parties politiques impliquées, en signe de bonne volonté , lâche du lest , privilégiant l’intérêt supérieur de la Nation mauritanienne . Il revient, dans ce cadre, au Pouvoir de faire le premier pas pour donner le gage de sa sincérité et de sa bonne disposition et afin de créer le climat propice à ce nouveau dialogue. Si une telle démarche avait été initiée plus tôt , nous n’en n’aurions pas été arrivés à la situation d’impasse actuelle marquée par , notamment , la méfiance réciproque . Enfin, en tant que légaliste et fervent adepte de l’orthodoxie démocratique et juridique et en tant qu’opposant convaincu, il me semble que la seule et unique voie pour faire partir le Président AZIZ du pouvoir c’est la voie démocratique, celle des urnes. N’empêche que celui-ci doit se comporter en tant que Président de tous les Mauritaniens, sensible à leurs doléances et disponible pour y répondre de façon positive et non pas le contraire. Ce qui aurait pu éviter d’en arriver à cette situation extrême.
Le Rénovateur : La situation de blocage politique actuelle aurait favorisé l’émergence d’extrémismes politiques tant au niveau de la COD, qu’au niveau de certains milieux négro-mauritaniens ( FLAM et TPMN ) ou haratines ( IRA sous la houlette de son président BIRAME OULD ABEID ) . Quelle lecture faites-vous de cette émergence ? AOH : Bien que je sois , par principe , opposé à tout extrémisme , je tiens à rappeler , d’une part , que l’extrémisme existe dans tous les bords politiques mauritaniens et que , d’autre part , tous ces extrémismes auxquels vous faites allusion sont consécutifs aux injustices subies par les populations . C’est le cas, en particulier, des FLAM et du mouvement du TPMN qui se seraient révoltés contre les injustices subies par les Négro-mauritaniens et dont les plus récentes ont concerné les opérations d’enrôlement des populations, même si ces opérations ont connu récemment des améliorations dont il faut se féliciter et qui ont permis de remédier aux comportements maladroits de fonctionnaires zélés . je profite de cette opportunité pour mettre en relief l’importance de cette opération pour le pays quand elle est menée dans les règles. C’est le cas aussi de l’IRA dont les dernières sorties fracassantes seraient des signes de désespoir quant à l’éradication définitive de ce crime odieux que constitue l’esclavage. S’agissant de ces actions de l’IRA je dirai aussi que, si je ne peux que condamner l’autodafé de tout ouvrage de connaissances, je condamne aussi l’acte du président de l’IRA par lequel ce dernier a ordonné de brûler, au su et vu de tous, les principaux ouvrages de référence du rite malékite en Mauritanie. Il n’en demeure pas moins que cet acte a été récupéré à outrance pour des fins politiciennes. Aussi, comme l’intéressé a présenté ses excuses publiques au peuple mauritanien pour l’offense subie et dans le souci de préserver l’unité nationale, je réclame la libération de Birame et des autres militants détenus de l’IRA. En conclusion , l’on pourrait dire, qu’étant donné la grande place de l’Islam dans la société mauritanienne dont il constitue le ciment d’unité et comme notre diversité est pour nous une source de force et non de faiblesse , si tous les Mauritaniens étaient égaux en droits et devoirs devant nos lois nous aurions pu faire l’économie de tous les extrémismes qu’a connus notre pays ( racisme , chauvinisme, éthnicisme , fondamentalisme…) .
Le Rénovateur : Quel commentaire vous inspire la récente décision de limogeage de l’ex-président de la Cour suprême, M. SEYID OULD GHAYLANI ? AOH : Nonobstant les aspects personnels de ce limogeage, je voudrais, d’emblée, insister sur la nécessité de respecter les dispositions constitutionnelles consacrant la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la Justice. Je dirai aussi qu’il ne s’agit pas de cas unique, d’autres cas non moins surprenants l’ont précédé, mais n’ont pas fait l’objet de la même médiatisation. A la différence que pour le cas de SEYID OULD GHAYLANI que celui-ci avait refusé, dans un premier temps, son limogeage avant de l’accepter pour des raisons qui lui sont propres. En tout état de cause, il convient de souligner que les formes juridiques de ce limogeage n’ont pas, de mon point de vue, été respectées. Ce qui est fort regrettable. Ainsi, nos propres lois que nous devons, tous, appliquer avec rigueur ont-elles été transgressées.
Le Rénovateur : Un pays voisin, le Mali, vient d’être secouée par un putsch militaire contre un Président démocratiquement élu et à quelques semaines de la fin de son dernier mandat non renouvelable. Lequel putsch a favorisé la partition de ce pays dont la moitié nord se trouve entre les mains de mouvements rebelles et terroristes ayant proclamé l’indépendance de cette zone. A cela s’ajoutent de grands flux de réfugiés maliens vers les pays limitrophes et les dégâts causés par la sécheresse et la famine dans cette région. Dans un pareil contexte, quel rôle, pour vous, devrait jouer la Mauritanie ? AOH  : Tout d’abord, Je réitère ma condamnation de ce putsch. Le Mali n’est pas seulement un pays voisin, c’est aussi un pays frère. Il s’agit pour nos deux pays, dans le village planétaire, du même destin. Il est donc de l’intérêt pour notre pays , aux plans sécuritaire , de bon voisinage et d’échanges , d’œuvrer , en collaboration avec les pays du champ et les pays amis , à la restauration de la stabilité du Mali et à aider celui-ci à recouvrer son intégrité territoriale et sa stabilité politique , à reprendre son processus de développement économique et social et , à retrouver sa démocratie . Ainsi , loin de toute ingérence dans les affaires intérieures maliennes , les autorités mauritaniennes devront faire tout ce qui est en leur possible pour aider à la réconciliation nationale et à la restauration de la paix dans ce pays voisin et frère . Il va de l’intérêt des deux pays et de toute la sous-région.
Le Rénovateur : L’Etat mauritanien vient de faire obligation aux ressortissants étrangers résidant sur le sol mauritanien de se munir de carte de séjour . Cette décision a fait couler beaucoup d’encre . Qu’en pense OULD HAMZA ? AOH : Il est tout à fait légitime qu’un Etat souverain recense tous les étrangers présents sur son sol national .Il y va de sa souveraineté. Cependant, cela doit se faire de façon souple et tenir compte de la situation des concernés. Dans ce cadre, les pouvoirs publics mauritaniens devront accorder aux recensés toutes les facilités administratives et financières nécessaires. Aussi bien en termes de délai (à prolonger) que de frais financiers, ces derniers restant symboliques . Même si la réciprocité est une procédure, aujourd’hui, consacrée par les usages, il n’en demeure pas moins que les pays ne doivent pas être soumis au même traitement. Il y’a les pays voisins et unis avec la Mauritanie par l’histoire et la communauté de destin, comme c’est le cas, en particulier, du Sénégal, du Mali et de la Gambie dont les ressortissants devraient être exemptés de tous frais d’établissement de la carte de séjour. Il y a d’autres pays qui sont privilégiés avec qui nous entretenons des relations fraternelles et qui accueillent sur le sol une grande communauté mauritanienne. C’est le cas notamment de la Côte d’Ivoire, du Niger, de la Guinée Conakry, du Congo Brazaville et de l’Angola qui doivent bénéficier des facilités possibles. Il y a enfin les autres pays auxquels doit être appliqué le principe de la réciprocité. Il y va de l’intérêt de nos diasporas éparpillées dans ces pays pour leur éviter des mesures de rétorsion et de réciprocité.
Le Rénovateur : Vous auriez déclaré que vous ne seriez pas candidat pour un nouveau mandat à la tête de la CUN . Pour quoi vous renoncez à une telle candidature ? AOH : A cela les raisons ne manquent pas. Je suis déçu par le manque de décentralisation et de collaboration saine des pouvoirs publics. Je suis également choqué par le peu de considération accordée par ces pouvoirs aux élus du peuple dont je fais partie. Ma déception est aussi attisée par le fait que je n’ai pu utiliser les milliards que la CUN que je dirige et qui ne bénéficie d’aucune subvention de l’Etat a pu économiser au profit de mes concitoyens pour la réalisation notamment d’infrastructures de développement et divertissement par manque de terrains et de coopération de l’Administration, au lieu de me limiter à quelques actions culturelles, sociales et sportives. L’accumulation de toutes ces frustrations pour un homme politique comme moi, indépendant et libre dans sa pensée, ferme dans ces convictions ne peut que me pousser à renoncer à un nouveau mandat, tant que les choses n’auront pas changé dans la bonne direction.
Le Rénovateur : Un dernier mot ? AOH : Je lance un appel à tous les Mauritaniens et les invite à dépasser les guerres de chapelle ou de leadership et les conflits personnels ou idéologiques pour travailler ensemble à la réconciliation du peule mauritanien, toutes composantes confondues , à la stabilité du pays et à son développement . En un mot , contribuer à l’édification d’une Mauritanie réconciliée avec elle-même ,apaisée , forte , unie , prospère , démocratique et où tous les citoyens sont égaux en droits et en devoirs . La Mauritanie mérite tout cela et même plus .
Propos recueillis par Amadou Diaara

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