lundi 18 juillet 2011

Regroupement de la Presse Mauritanienne (RPM): De quel appui a besoin la presse mauritanienne ?


Même si la presse mauritanienne existe depuis trois décennies et qu’elle a contribué de façon significative à l’ancrage de la démocratie et des valeurs de citoyenneté, elle n’a bénéficié d’aucune aide publique du budget de l’Etat.

C’est pourquoi l’institutionnalisation de l’aide publique à la presse est restée une revendication pressante de tous les acteurs de la société médiatique d’autant que ladite aide a été consacrée par la loi comme un droit pour la presse et une obligation pour l’Etat.

Cette absence d’appui gouvernemental à la presse, en plus d’autres facteurs subjectifs ou extérieurs, a eu des incidences désastreuses sur la presse privée aujourd’hui au fond du gouffre, après avoir attendu longtemps cet appui tant de fois annoncé.
Pour contribuer à accueillir le sauvetage de la presse privée, le RPM, qui regroupe la plupart des organes de presse privés, propose ce document où il apporte des réponses précises à cinq questions fondamentales :

- Dans quel état se trouvent les institutions de la presse privée en Mauritanie actuellement ?

- Quels appuis sont apportés à la presse privée dans les pays démocratiques ?

- De quel appui a besoin la presse privée actuellement ?

- Quelles sont les conditions requises pour bénéficier de l’appui public

- Enfin quels sont les critères de sélection qui permettent de classer les institutions de presse ?

I : Diagnostic de la situation

La presse privée en Mauritanie est née à la fin des années 80 par des initiatives individuelles de jeunes intellectuels travaillant, pour la plupart, dans le domaine et soucieux, surtout, de se faire des passerelles avec le public afin de contribuer aux transformations sociales et politiques auxquelles notre pays, notre région, et peut être le monde entier aspiraient avec impatience dans un contexte où un vent de démocratie soufflait sur plusieurs continents.

Ce contexte qui a vu le démarrage de telles initiatives a marqué durablement la presse indépendante dont les initiateurs étaient mus davantage par une volonté de contribuer à influencer et à impulser le changement que par désir de réaliser des bénéfices. Leur situation a été encore compliquée par l’entrée en lice de milieux sociaux et politiques hostiles qui se sont employés, très tôt, à endiguer ce phénomène perçu comme « dérangeant » par de multiples procédés dont la censure souvent désastreuse pour les institutions de la presse indépendante , puis, plus tard, la banalisation visant à les dépouiller de toute crédibilité, c'est-à-dire de leur ‘capital’ principal.

Avec la modernisation de l’arsenal juridique depuis le début de l’année 2006 et du fait de la banalisation, la plupart des acteurs du secteur ont commencé à être habités par la nécessité de passer des initiatives individuelles à de véritables institutions de presse.

Cet esprit est apparu dans la loi promulguée en 2006 et d’autres lois et décrets qui ont suivi même si le manque de rigueur dans la mise en œuvre de telles orientations théoriques a empêché le secteur d’en tirer profit en dépit des sacrifices et efforts consentis pour se conformer aux nouvelles orientations. En observant l’état actuel des institutions de presse, on constate :

Des efforts conséquents et une détermination croissante à se doter d’un statut de véritables institutions de presse avec un siège convenable, un minimum d’équipements, un personnel et un souci manifeste de se professionnaliser ; Un accroissement soutenu des charges financières par le passage d’un statut d’initiatives individuelles à celui d’institutions de presse : location d’un siège, salaires des employés, factures d’eau, d’électricité et de téléphone, coût de l’impression, de la conception et de l’entretien des sites, les impôts et la couverture sociale ;

L’assèchement continu des ressources propres des institutions de presse ont les ventes n’ont cessé de péricliter du fait de l’absence d’une société de distribution et de la concurrence impitoyable de la presse électronique alors que les annonces publicitaires sont quasi inexistantes ou peu organisées lorsqu’elles existent du fait du népotisme tout en étant attribuées en grande partie à la presse officielle.

A : L’appui à la presse dans les pays démocratiques

L’appui à la presse indépendante dans les pays démocratiques n’est pas un service rendu aux journalistes ni aux institutions de presse mais plutôt, et avant tout, une partie de l’appui apporté par l’Etat aux citoyens. En effet, la presse assure un certain nombre de droits fondamentaux du citoyen, dont le droit à l’information, droit à l’expression et droit de contrôle de l’action des pouvoirs publics. C’est sur cette base que les vieilles démocraties et même les plus récentes offrent diverses formes d’appui à la presse indépendante. Ainsi peut-on citer :

- Le modèle français

La loi de finance française pour l’année 2011 octroie un appui à la presse d’un montant de 386.600.000 euros comme aide financière directe non imposable au profit de la presse française, ce qui représente 83% de l’aide publique dont bénéficie la presse française, les 17% restants étant constitués d’autres types d’appui, tout cela hors ligne budgétaire l’AFP et en dehors des 500.000.000 d’euros octroyés comme aide spéciale à la presse papier en 2010. Ces montants couvrent trois volets qui sont :

Le volet appui aux frais de transport et de courrier postal (268 milliers d’euros)

Le volet distribution (70 millions d’euro)

Le volet exonération des charges sociales et des cotisations des employeurs (14 millions d’euro)

Volet appui voyages et déplacements des journalistes (5 millions d’euros)

Volet appui à la distribution de la presse française à l’extérieur (2 millions d’euros)

Volet appui à la modernisation et d’amélioration de la distribution de la presse française en France (18 millions d’euros)

Volet appui aux éditeurs de la presse (10 millions d’euros)

Ces montants sont versés directement par l’Etat aux organes chargés de les gérer.

- Le modèle sénégalais

Le Sénégal octroie un appui financier public à la presse sénégalaise depuis 1996. Cet appui a atteint en 2010 la somme de 700 millions de FCFA. Le décret régissant cet appui alloue 10% du montant du montant à la formation des journalistes tandis que le reste est distribué en espèce, aux institutions de presse dont les allocations, au titre de l’année passée, ont varié entre 1 et 3 millions de FCFA. L’autorité de presse et de l’audiovisuelle du Sénégal se charge de superviser la distribution de cet appui.

- Le modèle malien

La presse malienne s’occupe elle-même de la distribution de l’aide publique directe aux bénéficiaires à travers une assemblée générale appelée « maison de la presse » qui regroupe les associations de journalistes du Mali et qui se charge de le distribuer aux institutions de presse. Le montant total de cette aide publique qui atteint 800.000.000 de FCFA est distribué aux organes de presse dont chaque quotidien bénéficie de 5 à 6 millions de FCFA.

B : l’aide proposée pour les organes privés mauritaniens

Sur la base du diagnostic précédent et de l’examen des différentes formes d’aide octroyées dans les pays démocratiques, le Regroupement de la Presse Mauritanienne (RPM) propose que l’aide publique destinée à la presse privée soit centrée sur les domaines suivants :

L’aide financière directe à travers une subvention annuelle qui aide les institutions à consolider leurs structures administratives et institutionnelles. Le volume de cette aide directe devrait absorber, au moins, 80% de l’enveloppe globale à appuyer la presse ;

L’appui à l’impression à travers une prise en charge, par l’Etat, des frais qui y sont liés, auprès de n’importe quelle imprimerie qui accepte de fournir les prestations requises aux organes éligibles à l’aide publique ;

Appui à la distribution par la contribution du gouvernement au budget d’une structure nationale qui serait chargée de la distribution de la presse à l’intérieur et à l’extérieur du pays ;

La prise en charge des cotisations des institutions de presse à la caisse nationale de sécurité sociale ;

A la formation et le perfectionnement

C : Les conditions d’accès à l’aide publique

Puisque l’aide octroyée fait partie intégrant du budget de l’Etat, la plus grande rigueur doit être observée pour ce qui est des critères essentiels requis pour en bénéficier. C’est pourquoi leRPM propose les critères ci-après :

L’existence d’un siège doté de l’essentiel des équipements ;

Le respect des délais et caractéristiques déclarées à 70% au moins ;

Telle est notre vision au niveau du RPM et nous la soumettons aux structures gouvernementales compétentes pour leur donner une idée précise de la situation que vit la presse privée, ses problèmes, ses besoins. Nous avons eu à cœur d’observer l’objectivité en essayant de concilier les enseignements tirés de l’expertise locale mais aussi des expériences étrangères auxquelles nous avons eu accès.

En soumettant à tous les acteurs concernés et aux décideurs, ces propositions, nous espérons contribuer à l’émergence d’une aube nouvelle d’amélioration et de consolidation des institutions de presse pour le plus grand bien de notre démocratie, de notre développement, de notre unité nationale et des valeurs cardinales de notre société.

Le bureau exécutif 



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