dimanche 29 juillet 2012

Mauritanie : la COD relance le débat sur la détention arbitraire de Ould Abeid.


La coordination de l'Opposition démocratique mauritanienne a reconnu cette semaine la mainmise du présidentOuld Aziz sur l'affaire du leader anti-esclavagiste de l'IRA Ould Abeid au moment même où sa santé se détériore en prison. Par la même occasion, elle a dénoncé la détention arbitraire du détenu.

Pour les observateurs cette dénonciation de la COD bien que tardive relance le débat sur l'indépendance de la justice et au de-là la révision de la constitution mauritanienne. Tenue jusqu'ici à l'écart du débat national et en particulier au sein de la COD, l'affaire Ould Abeid a pris une nouvelle tournure cette semaine à Nouakchott avec la reconnaissance de la détention arbitraire du président de l'IRA et de ses six militants par l'opposition mauritanienne.

L'enjeu est tellement sérieux que la COD a profité de l'occasion pour fustiger la mainmise deOuld Aziz sur le système judiciaire. Cette dénonciation intervient au moment où la santé du leader de l'IRA continue de se détériorer en prison au point qu'il a été transféré de Dar Naim à l'hôpital de Nouakchott suite à un malaise.

Face à cette situation les principaux chefs de la COD ont pris les devants en franchissant un nouveau pas dans la lutte contre le régime de Ould Aziz qui continue de camper dans le déni de l’esclavage. Pour les observateurs cette offensive relance le débat sur l’indépendance de la justice et le principe sacro-saint de la séparation des pouvoirs gages des institutions démocratiques et du progrès économique et social.

Tout le monde le savait ou presque depuis que le téméraire Ould Abeid a brûlé des livres de droit musulman du rite malikite que le président mauritanien en avait fait sa propre affaire pour régler un lourd contentieux avec l'IRA qui lui pompe l'air et surtout empêche le lobbying esclavagiste de prospérer.

En donnant des ordres en plein conseil de ministres pour punir les coupables et en instrumentalisant l'autodafé via les Imams et Oulémas, la télévision et la radio nationale le premier magistrat du pays empiète sur les compétences dévolues à la justice.

Et en créant de toute pièce un Haut Conseil Islamique pour sa cause Ould Aziz transforme le procès de Ould Abeid en une affaire politique qui est loin de trouver son épilogue malgré son interruption pour des raisons de vice de procédure. Pour l’instant ce sont les avocats de la défense qui gagnent la première manche mais il faudra s’attendre à une autre instruction toujours diligentée au plus haut sommet.

L’ingérence du chef de l’Etat dans les affaires judiciaires est légion en Mauritanie dont la plus célèbre et récente est celle de Ould Dadde. Arrêté depuis plus d’une année, l’ancien commissaire aux droits de l’homme a été finalement jugé et condamné à 3 ans de prison avec remboursement de 75 millions d’ouguiya. Sans l’intervention de Ould Aziz son fils qui a tiré sur une jeune fille en 2011 serait incarcéré aujourd’hui. Et que dire de tous ces cas flagrants d’esclavage dénoncés par l’IRA dont les auteurs ne sont pas inquiétés par la justice et que le président mauritanien continue de nier.

Au de-là de l’indépendance de la justice c’est la révision constitutionnelle qui est pointée du doigt par l’opposition Une révision partielle est en cours grâce aux accords de Nouakchottsignés en octobre 2011 par trois partis de l’opposition et la majorité qualifiés de façades par laCOD qui a boycotté les assises. Ces accords notamment sur la criminalisation des coups d’Etat et de l’esclavage ainsi que sur les partis politiques ont été adoptés par le parlement.

En clair cette avancée est une goutte dans l’océan puisque les pouvoirs du président de la république sont toujours exorbitants avec des rôles contradictoires étant juge et partie. Le rééquilibrage des pouvoirs de l’exécutif suppose un premier ministre responsable devant ses ministres et le parlement .Et surtout le respect strict de la séparation entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Un exemple édifiant.

La constitution en vigueur ne prévoit pas le cas d’une cohabitation en Mauritanie. C’est une hypothèse même si elle est utopique dans un tel régime présidentialiste qu’il faudrait prendre en considération pour les élections législatives en novembre prochain. Une évolution de la constitution est impérative pour ne plus donner au président les moyens de s’opposer au pouvoir parlementaire.

Il s’agira plus d’un pouvoir accru du parlement et du gouvernement à l’instar de toutes les bonnes démocraties qui fonctionnent aujourd’hui. C’est de cette manière seulement que Ould Aziz ou son successeur n’aurait pas de mainmise sur le système judiciaire. Un double défi pour la COD qui ne devra pas boycotter les prochaines élections ou bien accepter un gouvernement d’union nationale dans le seul but de faire avancer les débats dans un pays où plus de la moitié de la population est analphabète.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire