vendredi 6 avril 2012

Mali: diplomates algériens enlevés, possible levée des sanctions


Des diplomates algériens ont été enlevés jeudi dans le nord du Mali, région conquise par des rebelles touareg et des islamistes en proie au chaos, au moment où une levée des sanctions imposées par l'Afrique de l'Ouest contre la junte au pouvoir depuis deux semaines est évoquée.

C'est à Gao, dans le Nord-Est, que le consulat d'Algérie a été occupé par des islamistes armés qui contrôlent la ville y ont hissé le drapeau salafiste noir et ont "arrêté des diplomates algériens", selon des témoins. Alger a confirmé qu'un groupe d'assaillants "non-identifiés" ont emmené le consul et six de ses collaborateurs "vers une destination inconnue".

"Nous travaillons ensemble (avec la junte) pour créer les conditions de levée" des sanctions diplomatiques et économiques imposées depuis lundi par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a déclaré le ministre burkinabè des Affaires étrangères Djibrill Bassolé, envoyé à Bamako du médiateur ouest-africain, le présidentBlaise Campaoré du Burkina Faso.

"Je pense que ce sera pour très bientôt", a affirmé M. Bassolé, promettant de prochaines annonces "dans la bonne direction" du chef de la junte, le capitaine Amadou Sanogo.

La Cédéao a également annoncé "la mise en place immédiate de la force d'attente" de l'organisation ouest-africaine, entre 2.000 et 3.000 hommes déjà en alerte.

Les modalités du déploiement de cette force, dont on ignore encore si elle vise les putschistes, les rebelles touareg au nord, ou les deux, était en cours de discussion lors d'une réunion des chefs d'état-major ouest-africains à Abidjan.

Le coup d'Etat du 22 mars contre le régime du président Amadou Toumani Touré, a plongé le pays dans une situation dramatique: des rebelles touareg et groupes islamistes ont pris en fin de semaine dernière le contrôle des trois métropoles du nord - KidalGao et Tombouctou- sans rencontrer de résistance de la part d'une armée malienne sous-équipée, désorganisée et en déroute, coupant de fait le pays en deux.

Cette région est "au bord d'un désastre humanitaire majeur", a affirmé jeudi Amnesty international, rapportant notamment des cas de jeunes filles enlevées.

L'assistance humanitaire doit reprendre au plus vite au Mali, où la situation dans le Nord est de plus en plus critique, en particulier pour les dizaines de milliers de personnes déplacées par les combats depuis mi-janvier, écrit de son côté le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) dans un communiqué.

Les islamistes d'Ansar Dine, dirigés par le chef touareg Iyad Ag Ghaly, et des éléments d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ont pris le dessus sur le Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA), qui a annoncé unilatéralement mercredi soir la fin de ses "opérations militaires".

"Scandale"

Selon ce mouvement touareg laïc, le cessez-le-feu tient compte "de la libération complète de l'Azawad", région naturelle considérée comme le berceau des Touareg et dont ils revendiquent l'indépendance, mais aussi "de la forte demande de la communauté internationale".

"En réalité, de ce que l'on sait, le MNLA ne commande rien actuellement" dans le Nord, "c'est Iyad (Ag Ghaly) qui est le plus fort, et il est avec Aqmi", a déclaré à l'AFP une source militaire malienne sous couvert d'anonymat.

Un responsable de la communauté arabe du Nord-Mali a confirmé jeudi sur Radio France Internationale (RFI) le rôle clé des jihadistes dans la région et la présence de deux des principaux chefs d'Aqmi à Tombouctou, "actuellement, contrôlé par Ansar Dine et ses alliés d'Al-Qaïda".

Cette prééminence des islamistes sur le terrain, voulant imposer la charia, inquiète la communauté internationale, en particulier l'ONU, les Etats-Unis et la France qui a obtenu mercredi le vote d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU.

Tous ont appelé à un cessez-le-feu et condamné les violences rapportées dans le Nord, qui ont poussé des centaines de personnes à fuir les zones devenues inaccessibles à la presse et aux organisations internationales. De nombreux habitants ont fait état de saccages et pillages à Gao et Tombouctou, où la situation humanitaire devient préoccupante.

Selon des témoins, des centaines de civils ont quitté Tombouctou dans la nuit de mercredi à jeudi, essentiellement pour la Mauritanie et le Burkina Faso voisins.

D'après la junte, les nouveaux maîtres du Nord ont commis "de graves violations des droits de l'Homme", dont des viols, particulièrement à Gao.

Le chef de la diplomatie française Alain Juppé a évalué jeudi à "un petit millier" le nombre de touareg et islamistes qui combattent actuellement dans le nord malien, mais estimé qu'il n'y a pas de "solution militaire" aux revendications des Touareg.

Le président français Nicolas Sarkozy a qualifié de "scandale" la destitution du président malien Amadou Toumani Touré, soulignant que Paris était "extrêmement préoccupé par la situation sécuritaire". Il a exigé des mutins "de revenir à un processus constitutionnel".

La "convention nationale" initialement prévue jeudi par les putschistes pour fixer les termes de leur transition a été reportée sine die "compte tenu compte des difficultés d'organisation matérielle", selon la junte.






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