mercredi 25 avril 2012

Rapport de la CNDH : « Élargir le mécanisme du dialogue aux partis politiques encore réticents… ».


Le rapport 2011-2012 de la commission nationale des droits de l’Homme, deux semaines après sa remise au président de la République, a été rendu public. Ce rapport de 149 pages traite de toutes les questions relatives aux droits de l’Homme enMauritanie sur la période mars 2011 à mars 2012.

Après les chapitre « activités et évolution de la CNDH, les progrès, les constats de laCNDH à l’intérieur du pays » le rapport comporte une partie consacrée aux recommandations.

Des recommandations touchant le dialogue politique, le passif humanitaire, les refugiés, l’esclavage, la torture, les discriminations, la justice, les libertés publiques, la protection des personnes handicapées, le règlement des litiges fonciers, les droits économiques et sociaux, les droits des femmes et des enfants. Lire extrait des recommandations.

IV. Recommandations

L’amélioration de la protection et de la promotion des droits de l’homme est un processus permanent que les Institutions dont la Commission doivent alimenter par des recommandations inspirées à la fois par l’observation du respect de ces droits au quotidien et par les bonnes pratiques issues de la mise en œuvre des conventions de droits de l’homme ratifiées ainsi que par les conclusions des rencontres régionales et internationales de Droits de l’Homme.

La Commission est encouragée dans cette mission par la réceptivité de l’Administration qui accepte d’examiner les recommandations et de mettre en œuvre quelques unes .Cet encouragement est aussi stimulé par l’intérêt que le Parlement, la presse et les organisations de la société civile portent à ses recommandations.

Les recommandations de cette année sont centrés sur :

Au niveau politique, il est nécessaire d’élargir le dialogue à l’ensemble des acteurs qui souhaitent contribuer à l’amélioration de la Démocratie, au régime juridique des libertés publiques et à la protection des Droits de l’Homme. Les efforts de règlement des violations des droits de l’homme du passé doivent être poursuivis et aboutir à un apaisement social pour une clôture définitive de ce chapitre, un tel effort est à la portée de la Mauritanie.

Pour une question de cohésion sociale, la jurisprudence née de l’application de la loi incriminant l’esclavage doit inspirer les juridictions dans l’examen des allégations d’esclavage portées devant elles. La réponse la plus apaisée à la question de l’esclavage qui met objectivement fin à la polémique et aux passions sur le sujet est principalement judiciaire suivie de programmes socio économiques. Au plan social, il est urgent que soient pris les textes d’application de l’ordonnance sur les personnes handicapées.

4.1. Dialogue politique 

1. Élargir le mécanisme du dialogue aux partis politiques encore réticents sur tous les sujets dont l’examen peut être positif à la pérennisation du régime démocratique et à la forme républicaine de l’Etat, à la cohésion nationale et à la paix civile ainsi qu’au respect des préceptes d’égalité entre citoyens et des Libertés fondamentales.

4.2 Passif humanitaire et réfugiés

1. Mise en place de la commission d’identification des tombes dans un esprit consensuel et apaisé dont la composition devra être plurielle et comprendre les ayants droits et les organisations des droits de l’homme en la dotant de moyens suffisants lui permettant de réaliser ses missions ;

2. Accélérer le processus de règlement du passif humanitaire en procédant à l’indemnisation et à la régularisation par la réintégration des fonctionnaires et agents publics victimes des événements de 1989 dont les listes ont été établies et soumises pour leur mise en œuvre.

3 Promouvoir des actions de retour à la confiance entre les rapatriés et l’Administration, à la cohabitation harmonieuse entre les populations et par une gestion équitable des litiges, notamment fonciers

4. Rendre effectives, accessibles et efficaces les voies de recours aux rescapés militaires qui viendraient à formuler des réclamations auprès de l’Institution militaire.

5. Adopter dans les meilleurs délais le projet de loi sur l’asile actuellement en préparation au Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation.

4.3. Esclavage, discrimination et torture

1. Réviser la loi portant incrimination de l’esclavage pour y inclure une définition plus claire de la notion de l'esclavage et y intégrer les principes de protection et d’insertion socioprofessionnelle des victimes ;

2. Accorder aux organisations de la Société Civile la possibilité de se porter partie civile dans les affaires pour pratiques esclavagistes.

3. Réviser à la hausse les peines encourues par les personnes coupables de pratiques esclavagistes.

4. Réviser substantiellement à la hausse les amendes infligées pour leur donner un caractère réellement dissuasif et augmenter de manière significative le montant des indemnités allouées aux victimes pour en faire des leviers contributifs à l’insertion des bénéficiaires.

5. Mettre en place des programmes socio économiques élaborés et exécutés suivant une stratégie nationale globale et concertée centrée sur la lutte contre l’esclavage et comprenant des volets de sensibilisation, d'accès aux services de base et des activités génératrices de revenus en vue de mettre effectivement un terme à ce phénomène.

6. Incriminer et sanctionner la discrimination raciale suivant les dispositions de la convention internationale contre le racisme et pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ratifiée par la Mauritanie

7. Entamer et accroître la coopération avec les Organes d’application des Traités des Droits de l’Homme des Nations Unies, les Mécanismes thématiques et spécifiques du Conseil des Droits de l’homme, notamment le Rapporteur spécial sur la torture, le Comité de prévention de la torture en Afrique, le sous comité de prévention de la torture et le rapporteur sur la discrimination raciale

8. Criminaliser la torture en veillant à ce que les actes de torture, tels qu’ils sont définis à l’Article 1er de la Convention contre la torture, soient des infractions au regard de la législation nationale.

9. Interdire et prévenir les formes de torture et de mauvais traitements liées au genre ainsi que la torture et les mauvais traitements infligés aux enfants.

10 Permettre aux juridictions mauritaniennes de connaître des cas d’allégation de torture conformément à l’Article 5 (2) de la Convention contre la torture.

11. Appliquer à toute personne reconnue coupable d’actes de torture des sanctions appropriées proportionnelles à la gravité de l’infraction commise conformément aux normes internationales pertinentes.

12 interdire et prévenir l’usage, la fabrication et le commerce d’appareils ou substances destinés à la pratique de la torture ou à infliger des mauvais traitements ainsi que l’usage abusif de tout autre appareil ou substance à cette fin.

13. Faire en sorte que nul ne soit expulsé ou extradé vers un autre Etat où il existe un risque sérieux qu’il soit soumis à la torture et lutter contre l’impunité, en prévoyant des mécanismes adaptés pour les allégations de torture notamment au niveau des plaintes et des enquêtes ;

14. Adopter des pratiques conformes à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus ;

15. Mettre en place une réforme du système pénitentiaire afin de garantir les droits fondamentaux des..

15. Mettre en place une réforme du système pénitentiaire afin de garantir les droits fondamentaux des détenus en tenant compte de la surpopulation carcérale et en privilégiant les mesures alternatives à la détention des personnes, en faveur notamment des condamnés pour des délits mineurs

16. Garantir que les enfants et les femmes soient séparés respectivement des adultes et des hommes, et que les prévenus soient séparés des personnes condamnées.

17. S’assurer que les femmes détenues sont gardées par des fonctionnaires pénitentiaires exclusivement féminines ;

18 Garantir aux personnes gardées à vues le droit à la visite familiale, l’accès à un médecin et à une assistance juridique, le cas échéant gratuite, pour les personnes sans ressources ;

19 Informer les personnes gardées à vue de leurs droits à travers la présence de l’avocat et ce dès les premières heures de la garde à vue.

20. Assurer une formation périodique de mise à jour aux magistrats en matière de droits de l’Homme avec un curricula spécifique, au personnel judiciaire, aux responsables des maisons d’arrêts et aux officiers de la police Judiciaire.

21. Adapter et généraliser les programmes d’éducation, d’information et de formation pour le personnel civil et militaire chargé de l’application des lois, notamment le personnel de la police judiciaire de la gendarmerie et les gardiens des prisons qui doivent faire partie intégrante de leur formation conformément à l’article 10 de la convention contre la torture

22. Améliorer les conditions de détention dans le pays, en s’assurant en particulier que les mineurs, y compris les filles, soient séparés des adultes

23. Renforcer la coopération avec les organisations de Droits de l'Homme et la Société Civile pour s’acquitter pleinement des obligations émanant de la Convention contre la torture.

24. Mettre en place un mécanisme national de prévention de la torture confiée à la CNDH dont le mandat principal est de prévenir la torture à travers des visites régulières à tous les lieux où des personnes sont ou pourraient être privées de leur liberté, rédiger des rapports et formuler des recommandations et des observations sur la législation pertinente

4.4. Justice

1. Exiger de la police judiciaire la bonne tenue des registres de la garde à vue conformément à l’article 59 du Code de procédure Pénale (CPP) qui garantit le respect des libertés et la supervision de la justice.

2. Organiser rapidement des séminaires de formation sur les Droits de l’Homme au profit des administrateurs, magistrats, gendarmes, policiers et gardes ;

3. Créer des tribunaux de travail dans toutes les capitales régionales (à Zouerate etAkjoujt,);

4. Améliorer les conditions des prisons (constructions, réfection) et augmenter les allocations de nourritures et médicaments tout en les offrant à temps ;

5. Exhorter le Ministère de la Justice et le barreau à offrir l’assistance judiciaire aux accusés et aux condamnés démunis pour préserver leurs droits ;

6. Organiser efficacement les visites des détenus par les conseils ;

7. Mettre fin à l’isolement des détenus, notamment Salafistes en autorisant les visites des membres des familles des détenus, de leurs avocats et des représentants des institutions et organisations des droits de l’homme qui en expriment le souhait dans des conditions qui préservent la sécurité publique

8. Mettre fin à la détention des mineurs dans les prisons pour adultes par la création d’un centre fermé de rééducation des enfants en conflit avec la loi à l’image de celui déjà ouvert àElmina 

9. Diligenter dans les délais fixés par la loi l’instruction et le jugement des affaires de corruption portées devant les juridictions

10, Mettre en conformité les textes législatifs et réglementaires régissant les établissements pénitentiaires avec les dispositions des instruments juridiques internationaux relatifs aux Droits de l'Homme ;

11. Instituer le Juge de l'Application des Peines et un autre sur l’exécution des décisions judiciaires

12. Réviser les dispositions du décret n°70.153 du 23 mars 1970 fixant le régime intérieur des établissements pénitentiaires rendant obligatoire le travail des détenus.

13. Publier au journal officiel de la République Islamique de Mauritanie l’ensemble des lois de ratification et le corps des conventions internationales et régionales de Droits de l’Homme ratifiées pour constituer un code à mettre à la disposition des magistrats et autres praticiens du droit.

4.5. Libertés publiques

1. Réviser les textes législatifs et réglementaires organisant les libertés d'expression, d'association et de réunions afin de les mettre en conformité avec les instruments juridiques internationaux pour en assurer l'harmonisation.

2. Modifier la loi sur les associations notamment les dispositions de l'article 3 afin de supprimer l’autorisation préalable du Ministre de l’Intérieur pour la constitution des associations de personnes. La constitution de ces associations ainsi que leur dissolution doivent être soumis, en cas de contestation, à la seule appréciation du juge;

3. Renforcer les garanties de recours dans les situations d'abus de pouvoir en matière de restriction des libertés publiques ;

4. Garantir l'exercice du droit à une information pluraliste et mettre fin à la rétention de l’information en rendant les sources accessibles et ouvertes ;

5. Poursuivre l’ouverture des médias publics aux débats contradictoires pour que la liberté d’opinion au sujet de la conduite des affaires publiques soit nourrie par des points de vue divergents librement exprimés.

6. Adopter des dispositions légales visant à prévenir et à sanctionner, le cas échéant, les discriminations professionnelles fondées sur l’appartenance syndicale ou politique des personnes;

7. Réviser les textes législatifs et réglementaires sur l'organisation des réunions publiques et les manifestations, ainsi que sur la constitution des partis, conformément aux dispositions des instruments juridiques internationaux ;

8. Réviser les statuts des organisations syndicales afin qu’ils permettent aux travailleurs migrants d’y adhérer et d’y occuper des fonctions dirigeantes conformément au principe de liberté syndicale consacré par la Convention 87 et selon lequel tout travailleur, sans distinction, a le droit d’adhérer à une organisation syndicale de son choix.

9 Intégrer toutes les conventions du travail ratifiées par la Mauritanie dans le code du travail

10. Renforcer les mesures légales et réglementaires tendant à assurer le respect de la vie privée.

4.6. Protection des personnes handicapées

1. Adopter les décrets et les arrêtés d’application de l’ordonnance 2006/043 du 23 Novembre 2006 portant promotion et protection des droits des personnes handicapées dans les volets santé, éducation, formation professionnelle, accessibilité et participation

2 Transmission et dépôt des instruments de ratification au Secrétariat Général des Nations Unies.

4.7. Règlement des litiges fonciers

1. Réformer la loi foncière en vigueur afin de l’adapter au contexte sociopolitique et économique du pays ainsi que la mise en place d’un cadastre national qui déterminera la propriété privée et la propriété publique.

2. Associer et développer la concertation avec les communautés avant l’octroi de concessions de domaines agricoles aux investisseurs

3. Instruire les Administrations territoriales à traiter avec diligence, équité et dans la transparence les conflits fonciers

4.8. Droits économiques sociaux et culturels

1. Réactiver le rôle des inspections de travail dans la conduite et la surveillance des règles de recrutement..

4.8. Droits économiques sociaux et culturels

1. Réactiver le rôle des inspections de travail dans la conduite et la surveillance des règles de recrutement au niveau national et régional

2. Contraindre les sociétés de prospection à observer la transparence dans l’utilisation des matières de traitement des minerais, de déclarer de façon sincère l’impact réel des produits employés sur l’environnement et leur faire prendre toutes les précautions d’usage minimisant les effets négatifs.

3. Exhorter le Secrétariat Exécutif de lutte contre le Sida à ouvrir des bureaux dans les wilayas du nord à l’instar des autres régions en les dotant des médicaments, de matériels de dépistage et d’analyses ;

4. Inviter les maires à prendre leurs responsabilités juridiques en matière de garde et d’entretien des malades mentaux dans les limites territoriales de leur commune.

5. Intégrer dans l’ordre juridique interne les engagements internationaux de la Mauritanienotamment la Convention n°81 sur l’inspection du travail en établissant des statistiques relatives aux accidents de travail constituant un indice d’évaluation de l’impact et des répercussions sociales et économiques de ces sinistres ;

6. Inscrire le droit au développement comme objectif principal de toute politique ou action publique ou privée ;

7. Intégrer les recommandations internationales en matière d’habitat dans la législation nationale notamment à travers l’adoption d’un code régissant la location de l’habitat ;

8. Réformer le secteur de l’eau en s’appuyant sur la mobilisation du secteur privé et l’élargissement de l’accès à l’eau pour toutes les populations, surtout pauvres en milieux urbain et rural.

9. Améliorer l’accès des pauvres à la propriété foncière à travers la distribution de terrains en milieu périurbain ;

4.9. Droits des femmes et des enfants 

1. Généraliser et relever le quota des femmes dans les mandats électifs et améliorer les leviers permettant leur accès aux autres sphères de décisions.

2. Renforcer les capacités des organisations de la société civile féminines actives dans la promotion des droits de la femme.

3. Publier, vulgariser, appliquer et réviser les lois nationales concernant les femmes et les harmoniser avec les conventions internationales ratifiées par la Mauritanie :






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